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La slava (saint patron) chez les Serbes
Au VIème
siècle, lors des grandes migrations du peuple slave, les Serbes s'installèrent
dans les Balkans près du Danube en apportant avec eux le panthéon
des Dieux slaves. Les Serbes comme les autres tribus slaves étaient
polythéistes. Leurs principaux Dieux étaient : Péroun - dieu
suprême du siècle qui précédait l'adoption du christianisme, protecteur
céleste de prince et de sa droujine (communauté de guerriers), dieu
tonnant, maître du tonnerre et de la foudre, dieu de la guerre ; Dajbog
- dieu du soleil, son nom provient de la prière "donne-moi, dieu!",
donateur de tous les biens naturels qui existent sur la terre, selon
les croyances anciennes, le peuple russe est considéré comme son descendant
; Stribog - dieu des vents et des tempêtes, la poésie populaire
appelait les vents "les petits-fils de Stribog" ; Soud - dieu
du destin humain chez les slaves méridionaux, maître de Soudenitsas
et de Sretcha avec Nesretcha ; Sretcha et Nesretcha - deux
déesses des slaves méridionaux, elles filent deux fils du destin,
le fil de Sretcha représente tous les événements heureux de la vie
de l'homme, le fil de Nesretcha prédit les malheurs et les malchances,
quand Nesretcha rompt son fil, l'homme meurt ; Lada - déesse
principale du panthéon païen, la plus populaire de toutes, déesse
de l'amour et du mariage, gardienne du foyer domestique, certains
savants mettent son existence en doute ; Lélia - déesse du
printemps et de la révélation de la nature, toujours jeune et fraîche,
on la prend pour une fille de Lada...
Les Serbes comme les autres peuples indo-européens
installés dans la région, pensaient qu'il ne fallait pas mécontenter
les Dieux. C'est ainsi que pour les rendre plus clément, ils organisaient
au printemps et en automne des offrandes. Pendant ces rituels, ils
offraient aux Dieux toute sorte de bien : de la nourriture, les
premières moissons de blé, sacrifiaient du bétail et espéraient
recevoir en retour des récoltes abondantes, une bonne santé et toutes
autres réjouissances.
C'est les Grecs, déjà chrétien et maître des terres sur lesquelles
les Serbes s'installèrent, qui entreprirent la christianisation
des Serbes. Cette tâche fut difficile, en effet d'un côté le paganisme
était durement ancrer chez les Serbes et de l'autre, les prêtres
chrétiens prophétisaient en latin ou en grec alors que ces langues
n'étaient pas comprises par les Serbes. Ce n'est que deux cents
ans plus tard, au IXème siècle, grâce aux frères Cyril et Méthode
que la christianisation des Slaves et donc des Serbes commença.
Cyril et Méthode prophétisérent en langue slovène compréhensible
de tous, introduisirent le christianisme dans la région et fondèrent
la liturgie slavonne. Traditionnellement, on leur attribue l'invention
de l'alphabet dit cyrillique, encore utilisé aujourd'hui.
Ces précisions historiques nous permettent de mieux
comprendre l'origine d'une des plus grande tradition chez les Serbes,
la Slava. Lors de leur christianisation, les Serbes vivaient en
tribus, lesquelles étaient composées de plusieurs familles. Chacune
de ces familles et tribus avait, en plus des dieux du panthéon,
leur propre dieu, protecteur de la tribu, de la famille ou du bétail.
Souvent, ce dieu était personnifié en la figure d'un ancêtre, dont
l'âme était gardienne du bien contre le mal. C'est pour ces raisons,
que certains pensent que la Slava actuelle est la mystification
d'un ancêtre défunt, protecteur de la famille, dont l'origine provient
du culte du héros chez les Grecs et du culte des dieux romains,
Lara et Penata. D'autres pensent que la Slava est aujourd'hui fêtée
en souvenir du jour de la christianisation de la tribu ou de la
famille. Le saint, correspondant au jour de la christianisation,
était choisi pour commémorer cet événement. Cette seconde explication
est la plus proche de celle donnée par l'église. Mais l'origine
de la Slava est certainement plus ancienne. Ce qui est sûr c'est
que les rituels chrétiens actuels contiennent beaucoup d'éléments
pré-chrétiens. Par exemple St. Ilija, le "maître du tonnerre" a
beaucoup de similitude avec le dieu païen Péroun, St. Nicolas
qui est le protecteur de la mer et des marins est l'héritier des
dieux de l'eau.
Malgré les origines païennes du rituel de la Slava,
il fut accepté et permis par l'église. Pour quelles raisons ?
Un élément de réponse est donné par les anciens écrits chrétiens
relatifs à la Slava. Dans ces livres la Slava est appelée "souvenir
du saint", elle est reliée au culte des morts. Il est dit que le
rituel avait lieu dans l'église et comportait des éléments païens
: des animaux (vache, agneaux, pigeons,...) étaient amenés
devant et à l'intérieure de l'église pour être
égorgés par un prêtre faisant des prières. En 1219,
lorsque l'église serbe autocéphale fut créée, dans ses textes
fondateurs fut introduit le rituel de commémoration du saint mais
sans ce rituel à l'église. En effet, l'archevêque
Sava Nemanjic (1174-1235), qui en fut l'instigateur, fut le premier
à interdir aux prêtres, sous peine d'être excommunier, de donner
des prières aux bovins, agneaux et pigeons et d'organiser dans l'église
des cérémonies dédiées uniquements aux morts. Les gens pouvaient
fêter les saints et égorger des animaux, afin de servir la viande
aux invités, mais seulement chez eux. Dans ces seuls conditions
le prêtre était autorisé à aller dans les familles sanctifier ce
rituel. C'est ainsi que fut créé officiellement la Slava.
Le rituel de la Slava, définit par Saint Sava, comportait déjà tous les éléments (le cierge, le gâteau (krsni kolac), koljivo, vin, encens...) de la Slava actuelle. Les Serbes étant les seuls à avoir adopté ce rituel, se sont séparés des autres peuples
orthodoxes.
On peut signaler que la dynastie des Nemanjic fondatrice
du premier royaume médiéval serbe fêtait les Saint Archanges Michel
et Gabriel comme Slava.
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